J’ai vraiment hâte que cette grossesse se termine.
La grossesse après un deuil périnatal est vraiment difficile. C’est une angoisse permanente. On est là, on la vit, mais on y croit sans vraiment trop y croire …
Au début, il y a la peur – fondée – de la fausse couche. Les nausées et vomissements du 1er trimestre sont très handicapants, mais aussi rassurants : bébé est toujours là.
Et puis en psychologie on dit que vomir, c’est évacuer son passé.
C’est en effet au 1er trimestre que, symboliquement, on en fini avec sa vie d’avant. Après un deuil périnatal, on a beaucoup de choses à évacuer.
La première échographie est merveilleuse : non seulement elle rassure, mais elle permet de réaliser qu’il y a bien un autre bébé, là, au creux de notre ventre.
Mais le bénéfice est de courte durée.
Il y a ensuite les premiers mouvements du bébé, magiques et terribles à la fois. On s’accroche fort à chaque petit poc qu’on pourrait ressentir au creux de nous, mais l’irrégularité engendre beaucoup d’angoisse.
Et puis on réalise. On s’attache. Et on y croit toujours pas.
Au second trimestre, il a fallu tenir jusqu’à l’échographie des 22 semaines. Les médecins ont été sympa et on a eu un contrôle à 18 semaines. Parce que la plupart des malformations se voient déjà à ce stade.
Avant chaque échographie, notre souffle s’arrête. On vit en apnée pendant plusieurs jours, on ne dort plus et on imagine le pire, car on sait désormais que le pire existe.
Et même si elles sont rassurantes, on a toujours peur.
Nous avons pleuré quand on nous a annoncé une Gigotine en pleine forme. Beaucoup d’émotion et une grande claque d’amour.
Mais aussi, un sentiment ambivalent : nous avons bel et bien perdu notre petit garçon. Un petit garçon que nous n’aurons jamais.
Une petite fille qui ne serait peut être jamais venue si notre garçon avait pu vivre.
A ce stade, tout ce qu’on ressent dans notre corps est décortiqué, mesuré et analysé à chaque seconde. Je ne sens plus bébé depuis 10 minutes ? Il faut filer aux urgences ! ça me tiraille dans le bas du ventre ? C’est pas normal j’en suis certaine ! Un petit mal de crane ? C’est une pré-éclampsie je le sais !
Quand on vit un deuil périnatal, il existe des groupes de soutiens auxquels je me suis confiée. C’est très bien, mais le revers de la médaille, c’est que désormais je sais que tout arrive, à n’importe qui, n’importe quand.
On peut perdre un bébé au début de la grossesse, mais aussi à la toute fin sans aucune raison. Il arrive que l’accouchement se passe mal, ou que les médecins trouvent un problème au dernier moment. Certains parents doivent prendre la pire décision de leur vie, d’autres, comme nous, n’ont pas vraiment le choix …
On réalise alors que fabriquer un enfant est la chose la plus facile du monde. Le faire naître en revanche est d’une difficulté sans nom.
Enfin, arrive le 3ème trimestre.
Celui-ci m’a un peu apaisé.
En passant 28 semaine, je me suis dit que mon bébé avait des chance de vivre à présent, même s’il devait naître très prématurément.
Par contre, je n’ai pas pu préparer sa venue en avance. Je n’ai pas acheté de vêtements, ni décoré sa chambre. J’ai sorti le matériel qu’il me restait de mon grand. Certains amis m’ont donné des choses. Mais les acheter, faire la démarche de chercher quelque chose pour elle, ça a bloqué pendant très longtemps.
Ce n’étais pas une question de croyance, ou de superstition. C’est juste que je ne réalise pas encore. A 8 mois de grossesse, il serait peut être temps !
Hier, la sage femme me disait « quand bébé sera là ». Et la petite voix dans me tête de répondre « si bébé arrive ».
C’est terrible.
Je m’en veux.
Mais je ne peux pas m’en empêcher.